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Muñoz, Diego (2023): Le Nombril du Monde. Sur les chemins de la diaspora rapanui (île de Pâques, Chili et Polynésie française). Paris: Société des Océanistes.

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Abstract

L’île de Pâques, Rapa Nui, te Pito o te Henua… des noms évocateurs d’une terre que l’on imagine inhabitée et hantée par les mystères d’une civilisation disparue et qui aurait, elle-même, précipité son effondrement. En dépit de ces clichés, ces appellations sont porteuses d’une autre histoire. Cet ouvrage parcourt près de deux siècles d’expériences d’enfermement, de mobilité et d’enracinement hors de l’île au cours desquels une identité autochtone a pris forme. L’auteur montre de quelle manière cette société – après avoir connu de violentes déportations – a su renaître localement et dans la diaspora dès la deuxième moitié du XIXe siècle, et comment ces expériences se sont poursuivies dans le temps, aboutissant à la mise en place d’une nouvelle identité rapanui au XXIe siècle que les habitants de l’île qualifient de « polynésienne », « mā‘ori » ou encore « mā‘ohi ».

En effet, à partir de 1888, date à laquelle le Chili a officiellement annexé l’île par un traité, par la suite non respecté, les Rapanui se sont opposés aux lois et identités assignées par cet État latino-américain dont ils font toujours partie officiellement. Mais ils se sont aussi incorporés à ce pays en tant que citoyens, qu’ethnie indigène, qu’habitants d’un territoire stratégique, par ailleurs déclaré patrimoine national et mondial. Toutefois, au fil du temps et de leurs déplacements, c’est la Polynésie – et non l’Amérique du Sud –, à laquelle ils se sentent liés historiquement, qui est devenue le référent de leur identité culturelle, laquelle nourrit aujourd’hui un fort désir d’autonomie et de décolonisation vis-à-vis du Chili.

Les Rapanui ont su tisser de profonds liens réels et imaginaires, à la fois culturels, mémoriels, politiques ainsi qu’identitaires avec le Chili, Tahiti et bien d’autres îles polynésiennes. Dans ce processus sans fin de création de leur société, l’île est devenue leur kāiŋa, c’est-à-dire leur pays, leur terre nourricière, leur terre d’origine, la terre de leur dernier repos, et cela, même quand ils sont nés et ont vécu une grande partie de leur vie ailleurs.

Elle est aussi ce lieu que les Rapanui s’efforcent de protéger pour pouvoir le léguer aux nouvelles générations. Ainsi, dans ce processus dynamique de création de liens et de transmission mémorielle, Rapa Nui est devenue le « nombril du monde » – te pito o te henua – des Rapanui dans leur intégration globale, au-delà de l’île de Pâques.

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